Message de Brian Forbes, président du comité de direction de l’Association des Amputés de guerre, au sujet de la déclaration de principe d’Anciens Combattants Canada sur l’arriéré dans le traitement des demandes et sur les temps d’attente
Le 3 juillet 2020 — Comme vous le savez, le Conseil national des associations d’anciens combattants (CNAAC), au sein duquel l’Association des Amputés de guerre joue un rôle majeur, réclame qu’Anciens Combattants Canada prenne des mesures radicales et novatrices pour réduire le temps de traitement des demandes de prestation d’invalidité des vétérans et l’arriéré inacceptable accumulé. Comme l’a affirmé le sous-ministre Walt Natynczyk devant le Comité permanent des anciens combattants plus tôt cette année, la situation est devenue chaotique et s’est encore aggravée avec l’arrivée de la pandémie de COVID-19.
Je répète que la position du CNAAC devant cette crise administrative en cours repose sur les éléments suivants :
- Le Ministère devrait adopter la position selon laquelle les demandes de prestations d’invalidité des anciens combattants devraient être approuvées automatiquement en se basant sur les preuves raisonnables fournies par le vétéran et sa famille et que des « vérifications ponctuelles » pourraient être effectuées pour remédier à tout abus éventuel. La réalité que nous vivons actuellement fait en sorte que les rapports médicaux habituellement exigés par ACC pour appuyer ces demandes sont presque impossibles à obtenir pour le moment et, en conséquence, ACC devrait tenir compte de cette réalité dans son processus.
- Les cliniques de médecins et de thérapeutes commencent à rouvrir, mais ces professionnels sont tout simplement submergés par leur propre arriéré et par les rendez-vous qui ont dû être reportés. La rédaction de rapports médicaux pour étayer les demandes des vétérans n’est pas une priorité en ce moment pour ces médecins et ces thérapeutes débordés.
- À moins de prendre des mesures qui sortent de l’ordinaire, on ne pourra réduire rapidement le délai de traitement des demandes et les retards dans les décisions, étant donné la grande difficulté pour les vétérans d’obtenir les rapports médicaux nécessaires pour appuyer leurs demandes.
- Dans la communauté des vétérans, les principaux intervenants s’entendent pour dire qu’il faut adopter sans tarder une mesure administrative ou décisionnelle qui permette d’approuver rapidement ou automatiquement les demandes de prestation.
- Le CNAAC est convaincu depuis longtemps qu’ACC aurait déjà dû adopter une telle façon de faire il y a des années dans le cas des vétérans gravement handicapés, et ce, afin d’accélérer le traitement de ces demandes particulières et de contourner la bureaucratie gouvernementale. On pourrait adopter ce mode d’approbation sachant que, dans presque tous ces cas, on accorde en fin de compte la prestation, souvent après de nombreux mois de délai décisionnel. Après mûre réflexion, le CNAAC en est venu à la conclusion qu’il est maintenant temps d’élargir cette façon de voir les choses aux demandes de tous les vétérans.
- Mentionnons que la lettre de mandat courante que le ministre des Anciens Combattants a reçue du premier ministre contient une directive claire demandant qu’ACC adopte un mode d’approbation automatique en ce qui concerne les affections dont souffrent couramment les vétérans canadiens.
- Il faut aussi savoir, et c’est très important, que de nombreux programmes d’aide financière que les gouvernements fédéral et provinciaux mettent en place en ce moment reposent sur le principe « payer maintenant, vérifier plus tard ». Dans un certain nombre d’initiatives d’ordre financier, le gouvernement a cessé d’exiger des rapports médicaux pour justifier l’admissibilité à ces programmes, étant donné la difficulté d’obtenir des renseignements de la profession médicale au Canada en cette période trouble.
- Soulignons que la première réaction du Ministère et, plus particulièrement, du sous-ministre devant cette proposition d’approuver automatiquement ou plus rapidement les demandes de prestation, c’est que cette approche pourrait être adoptée dans le cas des prestations mensuelles; toutefois, étant donné que la majorité des vétérans choisit une indemnité d’invalidité forfaitaire, ce serait plus difficile à appliquer.
- Devant ce problème, et d’ici à ce que les demandes puissent être approuvées d’office, nous recommandons de payer l’indemnité d’invalidité sous forme d’allocation mensuelle, en procédant à une évaluation préliminaire au départ. En fin de compte, ACC aurait la possibilité d’examiner en profondeur le dossier pour déterminer l’ampleur de l’incapacité dans son évaluation finale et, à ce moment-là, le vétéran aurait le choix de convertir son allocation mensuelle en montant forfaitaire, dont on déduirait les allocations mensuelles déjà versées.
- Le grand avantage de cette recommandation, c’est que l’admissibilité du vétéran serait rapidement établie et que ses préoccupations au sujet de sa sécurité financière et de l’accès aux prestations de soins de santé et de traitement seraient résolues.
- Aux grands maux, les grands remèdes, dit-on, et cela s’applique particulièrement bien à cette situation.
Je vous informe que le Ministère a publié une déclaration de principe cette semaine pour répondre à cette grande préoccupation. Intitulé « Prise de décisions en temps opportun relatives aux prestations d’invalidité : Orientation stratégique pour améliorer les temps d’attente », ce document est une grande priorité depuis un certain temps déjà, non seulement pour le CNAAC, mais aussi pour le Comité permanent des anciens combattants et de nombreux autres groupes d’intervenants.
Le document d’ACC aborde les points suivants :
- Mission et situation actuelle
- Orientation stratégique
- Capacité de la fonction publique – Rapport d’étape et prochaines étapes
- Intégration – Rapport d’étape et prochaines étapes
- Innovation des processus – Rapport d’étape et prochaines étapes
- Numérisation – Rapport d’étape et prochaines étapes
- Échéanciers et résultats prévus
À mon humble avis, cette déclaration n’est qu’un énoncé de bonnes intentions concernant les objectifs à moyen et à long terme qui y sont décrits, mais ne permet pas de remédier à l’arriéré et de résoudre la crise actuelle, qui s’est amplifiée avec l’arrivée de la pandémie de COVID-19.
Dans sa déclaration de principe, ACC a adopté quelques-unes de nos propositions, notamment le recours prochain à l’approbation automatique des demandes qui concernent des affections courantes, l’application du principe de présomption dans le cas de certaines affections secondaires et l’assouplissement des règles concernant l’aiguillage médical dans des cas précis. C’est encourageant mais, malheureusement, le Ministère conclut que ce sera long à mettre en œuvre.
De plus, dans sa déclaration de principe, le ministère insiste sur l’annonce récente du gouvernement selon laquelle il accorde près de 90 millions de dollars à ACC dans le Budget supplémentaire des dépenses pour que le Ministère puisse conserver ses nouveaux employés afin de venir à bout de l’arriéré. Toutefois, ce nouveau personnel aura beaucoup d’apprentissages à faire et ne sera pas fonctionnel avant janvier 2021, voire plus tard.
Le Ministère a présenté officiellement sa déclaration de principe le 30 juin 2020 à divers groupes consultatifs ministériels. Au cours de la discussion entourant cette présentation, j’ai déclaré fermement que le Ministère devait accélérer son plan d’action en adoptant l’approche décrite ci-haut pour approuver rapidement ou automatiquement toutes les demandes de prestation qui n’ont pas encore été traitées.
Comme il est difficile d’obtenir des rapports médicaux auprès des divers fournisseurs de soins de santé, il faut répondre immédiatement à cette question fondamentale : Quel degré de preuve le Ministère est-il prêt à accepter pour approuver les demandes accumulées?
Il est évident que les vétérans ou les personnes qui remplissent leur demande pour eux doivent connaître la position du Ministère à ce sujet.
À mon avis, le principe « approuver d’abord, vérifier ensuite » que le CNAAC prône depuis plusieurs mois est un élément essentiel de la solution dans ce contexte.
Curieusement, ACC a affirmé lors de cette présentation que, apparemment, il faudra une « autorité gouvernementale supérieure » pour mettre en œuvre ce type d’initiative nouvelle.
En tout respect, je dois dire que je suis assez étonné par ce prétendu besoin d’une autorité gouvernementale supérieure, puisqu’il est évident qu’ACC a déjà réglé depuis des décennies cette question du degré de preuve nécessaire, en rendant ses décisions sur les demandes des vétérans. Dans ce contexte, on connaît depuis longtemps les bienfaits des dispositions de la législation qui concernent le doute raisonnable et le principe de présomption. Selon mon expérience, cet ensemble unique de principes décisionnels donne à ACC toute la latitude voulue pour modifier sa politique de manière constructive et ainsi résoudre la crise actuelle des temps d’attente.
En résumé, la déclaration de principe d’ACC contient un certain nombre de mesures constructives pour réduire l’arriéré et les temps d’attente inacceptables dans le traitement des demandes de prestation d’invalidité des vétérans. Toutefois, le gouvernement doit accorder une plus grande priorité à ces initiatives, en raison de leur portée et de leur cadence, afin de résoudre plus rapidement cette crise persistante.
Dans notre stratégie, nous prévoyons offrir un certain nombre de cas types pour évaluer le système décisionnel qu’ACC mettra en place d’ici la fin de l’année.
Nous vous tiendrons informés des développements de l’action que le CNAAC mène pour qu’ACC adopte un mode d’approbation plus expéditif, élargi, afin de résoudre ce véritable casse-tête administratif.
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